La bataille pour la présidence américaine

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Il reste encore neuf mois avant les élections présidentielles américaines, mais les États-Unis sont déjà entrés dans un territoire inconnu et une phase sans précédent. Ces termes ne sont probablement plus applicables à l’élection de novembre 2024 et il faudra en inventer de nouveaux. Le Parti républicain confirmera son candidat à l’élection présidentielle lors de sa convention en juillet, mais Donald Trump est tellement en avance dans les sondages que ses concurrents ont pour la plupart disparu après seulement trois primaires. Le président sortant Joe Biden a connu une mauvaise semaine, le conseiller spécial du ministère américain de la justice ayant publié un rapport sur la gestion par le président de documents classifiés lorsqu’il était vice-président. L’enquête a révélé que Joe Biden avait volontairement conservé et partagé des informations classifiées, mais que l’actuel président des États-Unis ne fera pas l’objet de poursuites pénales. Mais ce qui a fait les gros titres, ce sont les commentaires accablants du conseiller spécial sur la mémoire du président. Les États-Unis entrent bel et bien dans un territoire inexploré et une phase sans précédent.

Trump le perturbateur

L’establishment républicain a fait de son mieux pour marginaliser Donald Trump lors des primaires de 2016. Mais ils n’ont pas réussi à réduire la popularité de Donald Trump auprès d’un segment important et marginalisé du public américain. Donald Trump a ensuite battu des républicains chevronnés, un fils et un frère d’anciens présidents américains et de nombreux politiciens chevronnés. Les républicains n’ont pas eu d’autre choix que de soutenir Trump lors de l’élection présidentielle de 2016 et pensaient que l’entourer de nombreuses personnalités de l’establishment à la Maison Blanche serait le meilleur moyen de le contrôler.

Les républicains ont ainsi pu changer, modifier et renverser de nombreuses positions de Trump en matière de politique étrangère, de défense et d’économie, malgré le fait que Trump tweetait ses décisions politiques avant d’en discuter avec son propre personnel. La situation s’est tellement détériorée que Trump a renvoyé ses conseillers et son personnel chargé de la sécurité nationale les uns après les autres. Comme Trump n’avait pas de parti politique ni d’expérience dans la fonction, il a été contraint de travailler avec de nombreuses personnalités de l’establishment.

Lorsque Joe Biden est devenu le candidat démocrate incontestable et le futur président, les républicains ont essayé de se distancer de Trump et de ses actions pendant l’insurrection du Capitole et se sont contentés d’actions en justice inspirées par les démocrates contre Trump.

Toutefois, l’establishment républicain s’est rapidement rendu compte que s’il restait indifférent à la situation de Trump, il perdrait une part importante de la base républicaine qui adore Trump et le considère comme un messie. Cela a conduit l’establishment républicain à présenter des candidats très semblables à Trump sur de nombreuses questions conservatrices. Dans le même temps, ils ont apporté un certain soutien public à Trump en critiquant les litiges démocrate, qu’ils ont qualifié de chasse aux sorcières. Les dirigeants républicains espéraient que les démocrates parviendraient à faire aboutir leurs poursuites contre Trump, de sorte que ce dernier subisse de graves préjudices et perde les primaires.

Mais Trump, qui a l’habitude de vaincre les politiciens chevronnés, a fait table rase de Vivek Ramaswamy puis de Ron DeSantis. En fait, ils avaient très peu de chances, car Trump avait une avance de 60 % dans les sondages, les autres candidats républicains peinant à atteindre les deux chiffres. Quant à Nikki Haley, elle espère gagner en Caroline du Sud, son État d’origine. Mais il est peu probable qu’elle mette à mal la campagne de Trump pour remporter un second mandat à la présidence des États-Unis.

Complot de gauche

Le seul moyen qui reste à l’establishment américain pour arrêter Trump est la voie juridique.  Mais cela pourrait avoir un certain nombre de conséquences inattendues.

Donald Trump fait actuellement l’objet de 91 chefs d’accusation dans deux tribunaux d’État et deux districts fédéraux différents. Ces chefs d’accusation remontent à l’époque où il était président et à son passé. Il est accusé de fraude, de diffamation, d’agression sexuelle, d’argent dissimulé, de subversion électorale et d’insurrection. Nombre de ces procédures judiciaires n’ont pas encore commencé et ne seront pas terminées avant le jour de l’élection. S’il remporte l’élection présidentielle, la constitution américaine sera mise à rude épreuve.

La constitution américaine n’impose que trois conditions aux candidats à la présidence. Les candidats doivent être âgés d’au moins 34 ans. Encore, ils doivent être des citoyens américains de naissance, ce qui signifie qu’Arnold Schwarzenegger ne peut pas être président des États-Unis. Et enfin, les candidats doivent avoir résidé aux États-Unis au cours des 24 dernières années. L’insurrection a été ajoutée après la guerre civile américaine, où les participants n’avaient pas le droit de devenir des fonctionnaires.

Rien n’empêche Trump de se présenter aux primaires, car son inculpation n’est pas encore terminée. En théorie, même si Trump est reconnu coupable d’une inculpation pénale, il ne s’agit pas de questions juridiques mais de questions pratiques, telles que la manière dont il pourrait diriger la Maison Blanche depuis une cellule de prison. Chaque inculpation, au lieu de réduire les chances de Trump, n’a fait que l’aider et le renforcer. Trump avait présenté les affaires judiciaires comme un complot de la gauche contre lui et, en ce qui concerne la base de soutien républicaine, Trump reste leur seul sauveur contre l’establishment.

Pour environ la moitié de l’électorat américain, Donald Trump est leur leader, le chef de leur mouvance qui rendra à l’Amérique sa grandeur. Pour ses partisans, la dernière élection de 2019 lui a été volée. C’est le défi que Trump pose à l’establishment politique américain lors de l’élection présidentielle de 2024.

L’oligarchie démocratique

Tout au long de son premier mandat, le président sortant Joe Biden a montré que son état mental suscitait de sérieuses interrogations. Le nombre de gaffes, de citations erronées et de pertes de moyens de Joe Biden ont fait l’objet de discussions et de vidéos. L’enquête de l’avocat spécial du ministère de la justice confirme ce que beaucoup ont toujours su et ce que beaucoup de démocrates ont toujours craint.

Comment les États-Unis en sont-ils arrivés à une situation où la meilleure défense contre Trump est un homme de 82 ans dont l’état mental est sérieusement remis en question ? Le parti démocrate est dominé par de vieux routiers, tels que Nancy Pelosi, Joe Biden et Chuck Schumer. La seule alternative à Biden était Bernie Sanders, mais les anciens l’ont empêché de représenter le parti. Aucun sang neuf n’est apparu au sein du parti démocrate, car Pelosi, Biden et Schumer dominent la direction du parti et n’ont pas travaillé à la construction des cadres du parti. Par conséquent, seules des personnes comme Bernie Sanders représentent un pôle alternatif.

Dysfonctionnement

La question qui se pose aux électeurs américains est de savoir s’ils veulent réélire un homme qui a gouverné comme Trump, qui a été mis en accusation à deux reprises par la Chambre des représentants et qui a tenté de renverser le résultat des dernières élections ? Ou veulent-ils voter pour Joe Biden, qui aura 80 ans s’il gagne en novembre ? Si Joe Biden décède au cours de son second mandat présidentiel, ce qui est possible, sa vice-présidente, Kamala Harris, qui est profondément impopulaire, deviendrait présidente !

Les États-Unis entrent maintenant dans une phase critique où le pays est profondément polarisé sur son avenir, sa politique et sur ceux qu’ils considèrent comme leurs représentants et leurs ennemis. Cette situation a conduit à la remise en question le processus électorale et au refus d’accepter les résultats, comme nous l’avons vu lors de l’insurrection du Capitole en 2021.

En 2022, trois généraux américains à la retraite ont écrit sur une possible tentative de coup d’État aux États-Unis. Les généraux estiment que les rangs de l’armée américaine regorgent de potentiels rebelles, faisant référence aux émeutes du Capitole. Ils craignent que si Trump ne remporte pas les élections de 2024, des éléments de l’armée ne fassent quelque chose en entreprenant un coup d’État. Les États-Unis reviennent de plus en plus à l’époque qui a précédé la guerre civile.

Ce dysfonctionnement et cette polarisation ont déjà un impact sur la position mondiale de l’Amérique. Les républicains refusent désormais d’autoriser l’aide financière et militaire à l’Ukraine. Les vassaux des États-Unis dans le monde pourraient constater que les États-Unis ont des problèmes plus urgents chez eux que de leur venir en aide. Les États-Unis ressemblent désormais à l’Empire romain, qui s’est effondré parce qu’il était accaparé par des divisions et une profonde polarisation.

Adnan Khan

thegeopolity.com

Traduit par l’équipe de La Pensée Islamique

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