Trump et le sommet de l’OTAN

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Question: Le sommet de l’OTAN a eu lieu à Bruxelles, capitale de la Belgique et capitale de l’Union Européenne, le 11 et le 12 juillet 2018. Le président américain et les leaders des 29 pays membres ont tous participé à ce sommet. Le débat entre eux et Trump était quasi entièrement consacré à l’augmentation des dépenses militaires de sorte à atteindre 2% du PIB. Pourquoi les Etats-Unis font-ils cela ? Quel sera le sort de cette alliance ?

 

Réponse : Afin de clarifier notre réponse, nous présentons d’abord les points suivants :

1. Le président américain agit de manière différente, loin toute diplomatie. Il proclame ouvertement ce qu’il désire et met publiquement la pression sur les autres : ce qu’il dit et demande dans les coulisses correspond à ce qu’il demande et demande en public, avec encore plus d’insolence et d’arrogance que George W. Bush fils. Il est à ce niveau, à l’opposé de son prédécesseur Obama, qui lui pour sa part mettait la pression sur ses homologues dans les coulisses en utilisant ruses et manœuvres comme le ferait un politicien anglais. D’ailleurs, Obama était le président qui a imposé l’augmentation de 2% aux pays membres en 2014 et qui avait mis la pression pour que cet accord soit respecté.

Les informations par rapport aux divers contacts qu’Obama avait avec les autres Etats membres n’apparaissaient jamais en public, ce qui donnait l’impression que l’Alliance était en cohésion et était unie, avec les Etats-Unis comme leader qui étaient satisfaits des autres Etats membres. Alors qu’en réalité, les Etats-Unis étaient dans un sérieux désaccord avec eux. Les Etats membres ont promis cette année-là à Obama qu’ils allaient respecter la promesse de dépenser la proportion de leur PIB respectif d’ici 2024. Mais 15 pays, dont l’Allemagne, le Canada, l’Italie, la Belgique et l’Espagne, sont toujours en train de dépenser 1.4% de leur PIB et seront incapable de respecter leur promesse. Ce qui enrage Trump. Toujours dans ce cadre, sous l’initiative américaine, les pays membres de l’OTAN vont s’engager pour 2030 à être capable de déployer dans un délai de 30 jours, 30 bataillons, 30 escadrons aériens et 30 navires de guerre pour contrer une possible attaque de la Russie. Les Etats-Unis sont en réalité en train de créer un faux ennemi (la Russie) afin de dominer l’Europe et les empêcher de prendre des décisions indépendantes en matières militaires et politiques. C’est pourquoi, ils essayent de les garder sous leur leadership.

 

2. Trump comprend la difficulté que représente le fait de convaincre les alliés de l’OTAN, c’est pourquoi il a écrit sur Twitter le 10/07/2018 alors qu’il se dirigeait au sommet de l’OTAN « La rencontre (prévue le 16 juillet 18) avec le président russe Putin peut être plus facile que le sommet de l’OTAN ». Cette parole de Trump est significativement vraie : la Russie semble docile et prête à vouloir servir les Etats-Unis afin d’atteindre certains de ses intérêts et paraître comme un acteur majeure sur la scène mondiale aux côtés de la première puissance, mais aussi afin de stopper la malveillance des Etats-Unis à son encontre en particulier dans ses zones d’influence et dans son entourage où les Etats-Unis cherchent à établir sa suprématie. Tandis que l’Europe, elle, est plutôt ennemie et rivale. Elle a créé son Union Européenne afin de contrer les Etats-Unis et la concurrencer. C’est pourquoi les Etats-Unis adoptent une attitude hostile envers l’Union et cherchent ouvertement à la démanteler. Ainsi, ils ont soutenu le Brexit. Trump a attaqué la politique de marché libre post-Brexit (le Soft-Brexit) de la Première Ministre britannique Theresa May et a dit :

« S’ils concluent un accord comme celui-ci, nous traiterons avec l’Union européenne plutôt qu’avec le Royaume-Uni, ce qui va probablement tuer l’accord », avant d’ajouter : « J’ai dit à Theresa May comment faire mais elle ne m’a pas écouté. Elle a voulu faire autrement ».

Trump a par ailleurs félicité Boris Johnson, le Ministre des Affaires Etrangère britannique qui a démissionné après s’être opposé au plan de May et a dit qu’il en aurait fait un premier ministre (BBC /The Sun 13/7/18). Trump a appelé ouvertement les autres pays membre à quitter l’Union Européenne. Il l’a même proposé au président français qui lui a rendu visite en avril dernier. Le Washington Post rapporte le 29/6/18 que « Trump a proposé à son homologue français Macron de sortir de l’Union Européenne pour signer un accord bilatéral avec les États-Unis lors de leur rencontre en avril dernier. » L’article cite deux responsables européens qui ont rapporté que : « Trump a dit à Macron : Pourquoi ne quittes-tu pas l’UE ? »

 

3. C’est aussi pour cela que Trump critique l’Union Européenne, en particulier l’Allemagne, car leur crise avec les Etats-Unis est plus profonde et plus grave ! Dans un question/réponse du 7 juin 2017, nous avions mentionné les raisons de l’escalade de la crise avec l’Allemagne en particulier. Nous avions dit : « L’Allemagne est le centre financier d’Europe et la quatrième plus grande économie dans le monde après les Etats-Unis, la Chine et le Japon. C’est pourquoi Trump tente de faire gagner de l’argent aux Etats-Unis en prétendant que la Russie est une menace contre l’Allemagne afin de pousser cette dernière à augmenter sa contribution à l’OTAN. Berlin dépense actuellement 1,2% de son PIB dans la défense (42 milliards de dollars).

La balance commerciale entre les Etats-Unis et l’Allemagne est largement en faveur de cette dernière, de plus de 60 milliards d’euros. Le volume d’échange commercial entre l’Allemagne et les Etats-Unis a atteint 165 milliards d’euros en 2016, desquels les  107 milliards sont les importations américaines en provenance d’Allemagne. Et nous avions mentionné : « la scène européenne va témoigner en faveur de l’émergence d’autres leaders allemands au niveau politique et économique. D’ailleurs, ceci est confirmé par le fait que des responsables allemands se précipitent pour réagir aux politiques américaines et l’annonce de l’Allemagne de vouloir ramener la dispute avec les Etats-Unis sur la scène publique. Si cela continue, l’Europe en sortira affaibli et en fin de compte, ceci mènera à un rapide armement lourd de l’Allemagne ».

 

4. Trump a vu le défi de l’Allemagne et son indifférence face aux critiques américaines depuis qu’il a lancé son hostilité envers l’Union Européenne, union qui est considéré par l’Allemagne comme son plus grand marché économique et comme un outil pour se propulser sur la scène internationale et influencer la politique mondiale. Ainsi, Trump critique en particulier l’Allemagne et lui demande des centaines de milliards de dollars pour la protection octroyée par les Etats-Unis depuis la fin de la Deuxième guerre mondiale. Dans une déclaration qu’il a faites avant de commencer le sommet, il a dit en attaquant l’Allemagne lors de la réunion avec le Secrétaire Général de l’OTAN : « L’Allemagne est captive de la Russie parce qu’elle achète une grande partie de son énergie d’elle. Comment peut-on expliquer cela ? Ceci n’est pas juste ». Il a par ailleurs dit avant le début du sommet : « L’Allemagne est entièrement contrôlée par la Russie parce qu’elle achète 60 à 70% de son énergie de la Russie, mais aussi à cause du pipeline. Dites-moi si ceci est approprié… parce que moi je pense que ça ne l’est pas et ceci est une très mauvaise chose pour l’Otan. » (BBC, 12/7/18).

La chancelière allemande Angela Merkel a répondu en disant : « L’Allemagne a ses propres politiques et elle prend ses décisions de manière individuelle…  J’ai personnellement expérimenté le fait qu’une partie de l’Allemagne soit contrôlée par l’Union Soviétique. Je suis heureuse qu’aujourd’hui nous soyons unis et libre, la République Fédérale d’Allemagne. C’est pourquoi nous pouvons dire que nous implémentons nos politiques et prenons nos décisions de manière indépendante. » « Nous ne sommes ni prisonnière de la Russie, ni des Etats-Unis. » a déclaré le Ministre allemand des Affaires Etrangères Heiko Maas. (BBC, 12/7/18). Par ailleurs, Trump et Merkel se sont ignorés alors qu’ils avançaient dans le corridor du siège de l’OTAN en allant à la plate-forme pour la traditionnelle prise de photo. Trump a plusieurs fois dénoncé le projet de pipeline de gaz Nord Stream qui lie la Russie à l’Allemagne et a demandé à l’Allemagne de l’abandonner. Ce projet est critiqué par certains européens sous prétexte qu’il cause la division au sein de l’Union Européenne. La Pologne considère que l’Europe n’en a pas besoin. « Le Nord Stream est le modèle où les pays européens offre leur argent à la Russie pour lui donner des moyens qui peuvent être utilisé contre la sécurité de la Pologne » déclare le Ministre polonais des Affaires Etrangères Jacek Czaputowicz en arrivant au siège de l’OTAN (AFP, 11/7/18). Ce dernier parle au nom de Trump. Ceci, parce que la Pologne suit les Etats-Unis et travaille pour les intérêts américains au sein de l’Union Européenne. Ainsi, les Etats-Unis travaillent au sein de l’Union Européenne depuis de longues années afin de la détruire, mais ce qui est nouveau avec l’ère de Trump, c’est qu’ils y ont ajouté l’action directe et publique afin d’arriver à cette fin. C’est pourquoi forcer l’Europe à appliquer les 2% est  devenue une question fondamentale pour Trump. Son prédécesseur Obama n’avait pas réussi à forcer les européens à augmenter leurs dépenses militaires à hauteur de 2%. Si Trump réussi, ceci raffermira sa position au niveau national et augmentera les chances du Parti Républicain de gagner lors des élections de mi-mandat.

 

5. Toutefois, la France a été plus réactive. Le Président Macron a déclaré : « La France réaffirme son engagement à atteindre, comme ses partenaires, l’objectif de consacrer 2% de son PIB à horizon 2024 » avant d’ajouter «  la cohésion de l’OTAN n’est possible que s’il y a un vrai partage des responsabilités en la matière et sur ce sujet ». De plus, il a déclaré aux journalistes « Le président Trump n’a jamais, à aucun moment, en public ou en privé, menacé de se retirer de l’OTAN ». (Reuters, 12/7/18).A noter que la France dépense actuellement 1.8% de son PIB dans la défense. Mais elle travaille pour se rapprocher des Etats-Unis en espérant que cela lui procurera un rôle international à leurs côtés pour satisfaire leurs sentiments d’amour de la grandeur qui domine les français, toutefois, sans abandonner l’Union Européenne et sa peur du retour en puissance de l’Allemagne. La France travaille parfois en faveur de l’Union Européenne, comme c’était le cas notamment au sommet du G7 au Canada ou dans la guerre économique avec Trump, ou encore lors de la maintenance de l’accord nucléaire avec l’Iran malgré le retrait américain. Et parfois, elle tend plutôt à soutenir les Etats-Unis comme cela a été le cas lors du sommet de Bruxelles.

 

6. Trump a montré que les Etats-Unis étaient prêts à délaisser l’OTAN. Cette menace persiste bien qu’il ne l’ait pas encore fait. Il a déclaré la guerre à ses amis et ennemis. Ceci est une nouvelle direction dans la politique américaine dirigée par son insouciant président, et il est prêt à quitter d’autres alliances. Nous avions dit dans un précédent question/réponse du 16/6/18 « Tout ceci montre que le dossier de la guerre économique est très important pour les Etats-Unis, car ils continuent de souffrir des répercussions de la crise financière de 2008 avec des dettes qui atteignent plus de 20 trillions de dollars. Le président Trump qui possède une mentalité d’homme d’affaire travaille pour sauver l’économie des Etats-Unis, mettant en avant le slogan de « l’Amérique avant tout», ce qui menace de désintégrer les institutions internationales qui ont longtemps été utilisées par les Etats-Unis pour imposer leur influence au niveau mondial. Ce qui signifie la désintégration de l’ordre mondial et l’émergence d’une situation internationale nouvelle où les Etats-Unis ne sacrifient plus pour rester le leader mondial avec l’aide des autres pays envers lesquels ils font preuve d’indulgence notamment en tolérant des balances commerciales en leur faveur, mais dans lequel les Etats-Unis ne se préoccupent que de sa propre souveraineté et du profit commercial, sans plus avoir recours à l’aide des alliés pour les garder sous leur emprise et les faire marcher derrière eux.

 

7. Et donc la guerre entre les alliés est en train de faire rage. Ceci annonce la désintégration de leur alliance et l’apparition des guerres économiques et politiques entre eux. S’ils ne craignaient pas l’utilisation de l’arme nucléaire, une troisième guerre mondiale aurait éclaté le long des fronts des deux précédentes guerres. Ces alliés sont la source du mal dans le monde, par leur adoption de la malsaine idéologie capitaliste, qui fait du bénéfice le critère de leurs actions, et de la valeur matérielle, la seule valeur qui prévaut dans la société. Le monde est tombé dans le plus grand besoin de l’apparition de l’Etat du bien, le Califat Bien Guidé, sur la méthode prophétique qui propagera les valeurs spirituelles, morales et humaines et ne se contentera pas d’accomplir la valeur matérielle. Et Allah a des adorateurs sincères qui sont honnêtes envers le Prophète SAAWS – et nous n’innocentons personne devant Allah – qui travaillent jour et nuit afin d’achever ce grand bien. Leur langue est mouillée par le rappel d’Allah, et leurs membres sont préoccupées par la Da’wa à Allah et leur cœur est fermement convaincu de la victoire d’Allah.

 

Nous secourrons, certes, Nos Messagers, et ceux qui croient, dans la vie présente tout comme au jour où les témoins [les Anges gardiens] se dresseront (le jour du Jugement).   

4 Dhul Qi’dah 1439 AH

17/7/2018 CE              

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