Le nationalisme: l’instigateur de la balkanisation sanglante dans les terres musulmanes
Ce qui s’est passé à Srebrenica pendant la guerre de Bosnie, ayant abouti à un terme politique populaire de «balkanisation», a été une tache sombre dans l’histoire de la politique moderne. La délégitimation du leadership des régimes communistes-socialistes a eu un impact sur la politique intérieure de la Yougoslavie au début des années 90. La Yougoslavie a ensuite été divisée en plusieurs pays: la Slovénie, la Croatie, la Bosnie-Herzégovine, la Serbie, le Monténégro et la Macédoine. Les opposants au régime socialiste l’ont appelé une vague de démocratisation car il a mis fin au règne du régime communiste en Yougoslavie. Malheureusement, cette vague a également enflammé l’esprit du nationalisme basé sur l’ethnicité et la religion. En conséquence, le terme de « balkanisation » est maintenant davantage connu comme un terme géopolitique péjoratif identifiant la désintégration d’une région.
Les musulmans ont dû payer un prix très élevé à cause de cette balkanisation. La guerre de Bosnie qui a duré 3 ans, de 1992 à 1995, a été témoin du nettoyage ethnique de musulmans (à comprendre : un génocide) de centaines de villes et villages. Outre la longue et sombre histoire de la guerre de Bosnie, cet article se concentrera davantage sur la mise en évidence du concept de nationalisme sanglant qui est le principal investigateur de la balkanisation dans les terres musulmanes ainsi que la cause de la perte de milliers de vies musulmanes en Bosnie. C’est ce concept qui a encouragé le dirigeant serbe Slobodan Milosevic à nettoyer ethniquement les Musulmans de Bosnie, parce qu’il cherchait à créer une vision nationaliste d’une Grande Serbie, avec un territoire serbe ethniquement pur le long de la Drina.
L’idée dangereuse et vénéneuse du nationalisme que possédait Milosevic ne peut être séparée des racines historiques du nationalisme lui-même. Il est enraciné dans le concept de souveraineté westphalienne, qui a été développé par les nations chrétiennes en guerre d’Europe en 1648 et s’est manifesté par le concept d’un État territorial. Ses progrès ont culminé au XIXe siècle. L’idée du nationalisme considère qu’un État légitime est lié à une nation, qui est une ethnie spéficique ou un ensemble d’ethnies ou un peuple confiné à certaines limites géographiques.
Le nationalisme n’a donc pas de racines historiques dans la civilisation islamique. Si nous regardons de plus près la chronologie historique, le nationalisme était une nouvelle réalité imposée à la cartographie du monde islamique. Selon un chercheur sur la civilisation islamique d’Indonésie, le professeur Ajid Thohir, le nationalisme est né dans les terres musulmanes à la suite des intérêts impérialistes et colonialistes du 18ème siècle jusqu’au début du 20ème siècle. Malheureusement, elle a indirectement favorisé un esprit de fragmentation politique parmi les musulmans.
En fait, du plus ou moins 8ème siècle au 18ème siècle, la Oumma islamique était autrefois un peuple uni dont la direction et le centre de gouvernance étaient sous un système califal (le super État). Depuis sa naissance avec le message de Muhammad ﷺ, les musulmans avaient vécu comme une seule Oumma, non seulement unis sous une Aquida (croyance) mais aussi à l’ombre d’un système vivant. Aujourd’hui, avec plus d’un milliard de personnes, les musulmans vivent fragmentés dans leurs territoires nationaux, dirigeant leurs gouvernements séparés, appliquant leurs règles religieuses basées sur des problèmes dans leurs environnements séparés.
Depuis le début du 20ème siècle, les musulmans ont connu un processus de «balkanisation» à l’échelle mondiale sous couvert de nationalisme et de lutte pour l’autodétermination. Avec la décolonisation qui a produit de nombreux nouveaux pays au nom de l’indépendance du colonialisme occidental, le monde islamique fut divisé en plus de cinquante États-nations. Mais ce n’est pas la fin de l’histoire. La Oumma musulmane est tombée dans le piège de la nouvelle hégémonie occidentale. Les pays musulmans ont alors vécu sous l’ordre d’État-nation laïque, enveloppé de l’hégémonie du capitalisme et bourré de slogans de démocratie et de droits de l’homme.
Ironiquement, le sort des musulmans est loin d’être le progrès, la dignité et la prospérité. Environ 12,5 millions de musulmans ont été tués dans de nombreuses guerres au cours des 25 dernières années, selon le chercheur Refik Turan, chef de la Société historique turque, qui a déclaré lors d’une conférence en 2018 à Istanbul: «Cela comptabilise presque autant que les pertes d’une guerre mondiale. Ce chiffre n’inclut pas les musulmans torturés à mort par les bouddhistes au Myanmar et aux mains des Chinois au Xinjiang. De plus, des millions de musulmans mourant de faim, de maladies, de migrations et d’autres catastrophes causées par l’homme sont exclus de la liste.
Les frontières entre les États-nations ont également rendu les musulmans rohingyans aliénés de leurs frères musulmans au Bangladesh, en Malaisie et en Indonésie. Cela est également arrivé aux musulmans ouïghours qui ont souffert sous le tyran chinois et ont été abandonnés par les dirigeants musulmans en raison de la priorisation de leurs intérêts économiques nationaux. Cela n’inclut pas les centaines de milliers de réfugiés musulmans apatrides qui ont été déplacés de Syrie, d’Irak et de Palestine. C’est le prix élevé à payer pour la désunion et la division de la oumma.
En effet, l’Islam dénonce fermement et interdit à l’asahabiyah (fanatisme), y compris le nationalisme, d’être adopté comme l’identité des musulmans, plutôt que comme le lien de la fraternité islamique (ukhuwah Islamiyah). Allah dit «Les croyants sont vraiment des frères…» (Sourate al-Hujurat [49]: 10).
L’Islam nous enseigne que le lien le plus fort pour un musulman est la Aquida islamique qui se manifeste dans l’ukhuwah Islamiyah. Donc, ce lien doit être placé au-dessus de l’ethnicité, de la race ou de la couleur. Le Prophète ﷺ dit, «أوثق عرى الإيمان: الموالاة في الله, والمعاداة في الله, والحب في الله, والبغض في الله عز وجل» « Le nœud le plus fort de l’Imaan est: la loyauté pour l’amour d’Allah, l’inimitié pour l’amour d’Allah, l’amour pour Allah et la haine pour Allah, le Très-Haut. [Rapporté par Ahmad]
Une fois que l’Occident a eu connaissance de ce secret de la force de la Oumma musulmane, ils ont déployé tous leurs efforts pour la frapper et l’éliminer, ou du moins affaiblir le principe d’al-Walaa ‘wal-Bara’ah (loyauté et désaveu) du corps des musulmans. . Ils ont adopté l’idée du «nationalisme» pour réaliser leur objectif pervers. Par conséquent, la dure réalité à laquelle les musulmans doivent faire face et vivre est la perte du concept d’al-Walaa ’wal-Bara’ah du cœur de leurs générations successives. Leur loyauté envers l’islam a été progressivement diminuée et finalement brisée par des compréhensions erronées.
Tous les actes et luttes menées par la Oumma musulmane n’ont plus été pour les bienfaits de l’Islam, ni pour le bien de soutenir le Kalimah d’Allah (tawhid) sur cette terre. La croyance que l’islam est une miséricorde pour toutes les créations a été ébranlée. Ils n’ont pas voulu adopter les valeurs et les enseignements islamiques pour prospérer dans le monde et faire progresser une nation. Bien avant, l’islam avait averti sa Oumma de ne pas se laisser piéger par ce genre de compréhension erronée, car le nationalisme a été classé comme un concept de jahiliyya (ignorance) selon la perspective de l’islam. Dans un hadith, le Prophète ﷺ a vivement dénoncé les partisans de ashabiya d’être les gens de la Jahiliyya: «ومن قاتل تحت راية عمية يغضب لعصبة أو يدعو إلى عصبة أو ينصر عصبة فقتل فقتلة جاهلية» « Et celui qui se bat sous la bannière d’un peuple qui est aveugle (fanatisme), qui s’enflamme avec l’orgueil familial, appelle (les gens) à se battre pour l’honneur de leur famille et soutient ses amis et parents (pas pour la cause d’Allah) – s’il est tué, il meurt comme celui appartenant au temps de la Jahiliyya. » [Rapporté par Muslim]
Cette interdiction stricte est davantage élaborée par le Shaykh Muhammad Said Al-Qahthani comme il a dit: «Ce nationalisme est une forme de shirk parce qu’il exigerait que quelqu’un se batte pour cela, et déteste un autre groupe qui devient son ennemi – indépendamment des musulmans ou non – , donc indirectement il l’a mis en place comme partenaire d’Allah SWT ».
Muhammad Qutb a même mis l’idée de nationalisme en ligne avec d’autres idéologies hérétiques telles que le communisme, la laïcité et la démocratie, qui sont contraires à la Aquida islamique et peuvent invalider l’islam de quelqu’un. Il a estimé que cette idée apprend à ses adeptes à séparer l’Islam de leur vie. Son opinion n’est pas très différente de celle d’Abul A’la al Maududi, un savant pakistanais, dans l’un de ses écrits. Il a refusé la fusion de l’islam avec l’idée du nationalisme. Il n’a approuvé personne qui se prétend ‘nationaliste musulman’, car ni l’islam ni le nationalisme ne pourraient jamais s’aligner.
Le nationalisme a divisé, affaibli et rendu orphelin les musulmans en perdant leur gardien et en a fait des proies dont le sort est à la merci des prédateurs pillards qui les ramassent un par un chaque nuit. Imaginez qu’en 1995 seulement, nous avons perdu 8 000 vies musulmanes en Bosnie, et pendant ces 25 années nous avons perdu plus de 12,5 millions de vies musulmanes! Il est multiplié par 1500! De plus, cela n’inclut pas les données de toutes les arènes sanglantes du monde entier. C’est la condition misérable de la Oumma musulmane aujourd’hui, à la suite de la perte de son bouclier, le Khilafah islamique, qui a été détruit en 1924, il y a près de 90 ans.
L’Islam a obligé sa Oumma à vivre sous une direction politique, le Khilafah (califat). Il leur est interdit d’être fragmenté sous plus d’une direction politique, sans parler de vivre opprimé sous la tyrannie des majorités kouffar. Rendez le bouclier de la Oumma, qui éliminera l’hégémonie des kouffar sur les musulmans et protégera le sang et l’honneur des femmes et des enfants musulmans à travers le monde musulman! Le seul salut pour la Oumma est le retour du Khilafah basé sur la méthode prophétique. Le Prophète a dit: « Le commandant (des musulmans) est un bouclier pour eux. Ils combattent derrière lui et ils sont protégés par lui (des tyrans et des agresseurs). » [Sahih Muslim]
Dr. Fika Komara
Membre du comité central média de Hizb ut Tahrir